Clinique Médicale et Esthétique "Labelle"

Féminiser les visages

Féminiser les visages, la technique de chirurgie esthétique en plein boom

(Extrait de la publication ELLE, par Marie Muñoz)

/Publié le 29 novembre 2021/

 

Dans les cabinets d’esthétique, la demande de féminisation des visages d’hommes est en plein essor. Enquête sur une tendance qui s’installe.

 

22 % des 18-30 ans disent ne se sentir ni homme ni femme, selon une étude Ifop. Une crise de genre qui peut les conduire à vouloir se féminiser ou se masculiniser, avec toute la palette des possibilités que cela engendre. « Cette démarche ne doit pas être confondue avec la transsexualité. Il n’y a pas ici de considération sexuelle, il s’agit uniquement de l’aspect physique. Ça relève d’un goût esthétique », pointe la chirurgienne plasticienne Barbara Hersant. On pense aux artistes Christine and the Queens ou Bilal Hassani, aux mannequins transidentitaires Valentina Sampaio et Hari Nef ou encore au chanteur et comédien Harry Styles, nouveau boyfriend de l’actrice et réalisatrice Olivia Wilde. À 27 ans, il aime fouler les tapis rouges avec maquillage, colliers, sac à main… et il a récemment fait la cover du « Vogue » États-Unis vêtu d’une robe Gucci.

UN PHÉNOMÈNE ESTHÉTIQUE

Bousculer les codes du genre n’est pas nouveau, notamment chez les artistes. David Bowie, Mick Jagger ou Prince s’y sont adonnés en leur temps, tout comme le groupe Indochine, dont le titre « 3e sexe » sortait il y a trente-six ans. « Ce qui semblait marginal à l’époque est devenu aujourd’hui une tendance de fond », estime le Dr Gérald Franchi, qui pratique la chirurgie esthétique et réparatrice depuis de longues années. Surtout, en 2021, maquillage et vêtements ne sont plus les seules armes pour moduler son apparence. Les actes de médecine esthétique sont devenus courants chez les jeunes : comme Léo, 22 ans, qui porte volontiers du vernis à ongles et des cheveux peroxydés, de plus en plus d’hommes souhaitent avoir recours à des interventions qui féminisent le visage, de façon subtile. « Je prévois de faire des injections dans les lèvres, mais c’est tout, explique-t-il. Je me sens bien dans mon corps d’homme et je ne souhaite pas aller plus loin. Cependant, jouer avec les codes féminins me permet de casser les barrières et de ne pas être défini selon un genre. »

VERS UNE « DÉGENRISATION » ?

Avec 70 à 80 % des demandes esthétiques*, c’est le versant féminin qui l’emporte sur le masculin, à tel point qu’on a donné un nom à l’ensemble des techniques pratiquées en esthétique pour féminiser un visage : la FFS, pour Facial Feminization Surgery. Au-delà des personnalités en vue et des moins de 30 ans qui cherchent à se dégenrer, ce courant de dévirilisation des traits gagnerait tous les hommes. À en croire les médecins présents lors du congrès annuel AIME (Assises pour l’innovation en médecine esthétique), la demande explose, et ce dans tous les milieux socioprofessionnels. « Auparavant, les demandes étaient très binaires, les patients voulaient être clairement soit une femme soit un homme », résume le Pr Jean-Paul Meningaud, spécialiste en médecine anti-âge et en chirurgie plastique et reconstructrice. Aujourd’hui, il existe de nombreux intermédiaires, et les frontières se brouillent.

EN CABINET, DES ACTES CIBLÉS

Pour féminiser les traits, les spécialistes de l’esthétique s’appuient sur les caractéristiques génétiques de chaque sexe. « Le visage de l’homme se distingue de celui de la femme par sa morphologie plus anguleuse et carrée, souligne le Dr Franchi. Il possède des reliefs osseux plus marqués : bosse entre les sourcils et sur le front, menton plus massif et carré, nez plus saillant, pomme d’Adam visible, menton proéminent. » Le visage féminin est lui plus arrondi, ovale ou en forme de cœur, avec un menton plus pointu. Les traits sont globalement plus doux. La féminisation faciale consiste donc à estomper ou supprimer les stigmates masculins pour adoucir les traits. Passer par le bistouri du chirurgien n’est pas obligatoire. Certaines interventions, comme le dessin des lèvres, la restructuration des pommettes ou le travail sur les contours du visage, se font en cabinet médical en injectant de l’acide hyaluronique plus ou moins volumateur. Le produit se résorbant au bout d’un à deux ans, en moyenne, l’acte n’est pas définitif, les déçus ou les indécis peuvent donc faire marche arrière. Pour aller plus loin, la chirurgie s’impose. On pourra faire un remodelage osseux du front ou des arcades sourcilières, grâce à la profiloplastie, qui inclut également la réduction du nez et du menton. Avoir recours à des implants de cheveux permet de combler les golfes temporaux dégarnis. Certains hommes vont jusqu’à opter pour l’avancement de l’implantation capillaire de manière à diminuer la taille du front. La réduction de la pomme d’Adam peut aussi être envisagée. Elle réclame une anesthésie générale et une bonne semaine de rétablissement.

SIGNES INVOLONTAIRES DE MASCULINITÉ

Si les hommes cherchent à adoucir leurs traits, les femmes sont peu demandeuses d’actes qui masculinisent leur visage. « La demande est très restreinte, même dans les cas de transidentité qui s’accompagnent d’un changement de sexe », note le Dr Franchi. La prise d’hormones efface alors assez facilement les caractéristiques féminines. La pilosité apparaît, les golfes temporaux se dégarnissent, la peau s’épaissit et change de texture. Cependant, il est bon de se méfier de certaines interventions très prisées actuellement des jeunes femmes, inspirées par la très retouchée Bella Hadid. Si elles n’ont pas pour but de masculiniser le visage, elles peuvent avoir cet effet lorsque le médecin a la main un peu trop lourde. C’est le cas notamment des injections de comblement visant à restructurer la mâchoire en marquant l’angle mandibulaire. Le profil est impeccable sur les selfies, mais, dans la vraie vie, il risque de devenir trop lourd et carré. Une caractéristique définitivement virile.

* D’après une étude révélée au dernier congrès AIME.

FEMMES : DES TRAITS PLUS DOUX POUR BIEN VIEILLIR

La féminisation des traits n’est pas qu’une affaire d’hommes. Avec l’âge, les femmes peuvent en avoir besoin. En se creusant au niveau des tempes et en s’affaissant au niveau des bajoues, leur visage devient souvent plus rectangulaire. Les pommettes semblent aussi moins saillantes, les lèvres s’affinent, et les rides frontales font le regard plus sévère. Un nez bien droit à 20 ans peut se marquer d’une bosse et perdre sa finesse au niveau de la pointe. « Ces effets du vieillissement ont tendance à masculiniser le visage. Or, grâce aux travaux de psychologie expérimentale, nous avons aujourd’hui une compréhension plus fine de ce qui rend un visage féminin attractif », note le Pr. Meningaud. Ces avancées permettent de trouver la parade. Au niveau du front, la toxine botulique est une bonne indication, à condition d’être utilisée avec parcimonie. « Dans le cas contraire, elle fait chuter les sourcils et masculinise encore un peu plus le regard », précise le professeur. Le nez sera rectifié à l’aide d’injections de comblement. Quant aux lèvres, on les regalbe avec un mini-lifting, l’« upper lip lift », qui raccourcit la zone comprise entre le nez et la lèvre supérieure et redessine l’arc de Cupidon. Enfin, pour le traitement des bajoues, les fils tenseurs ou le lifting centro-facial sont les plus indiqués.